Le contexte de travail

Quel est le climat de travail actuel des équipes ou des groupes dans lesquels nous désirons transférer des connaissances? A-t-on le leadership nécessaire pour mener à terme notre projet de TUC? À quelles ressources aurons-nous accès?

Le transfert et l'utilisation des connaissances ne se produisent pas en vase clos. Ils s’effectuent au sein d’un contexte particulier et sont influencés par divers enjeux économiques, politiques, organisationnels et sociaux. Parfois, il arrive que le contexte ne soit pas propice au TUC. Dans ce cas, l’implantation d’une activité de TUC serait vouée à l’échec, et ce, peu importe la qualité de l’activité ou de l’implantation. Il faut donc évaluer si le contexte dans lequel nous souhaitons transférer une nouvelle connaissance et la voir être utilisée est propice.

L’analyse du contexte d’une organisation peut s’avérer une tâche vaste et complexe, mais pas toujours. Trois éléments doivent minimalement être pris en compte lors du choix et de l’implantation des activités de TUC. Tout d’abord, le climat de l’équipe (ou du département, ou de l’unité) au sein duquel les activités de TUC sont implantées doit être positif et ouvert au changement. Deuxièmement, la dimension du leadership est un aspect primordial à la bonne implantation des activités de TUC choisies. D’une part, la dimension du leadership comprend un engagement clair de la haute direction. D’autre part, les gestionnaires doivent à la fois être motivés par le processus d’implantation et être en mesure de mobiliser leur équipe envers l’implantation. Un troisième élément devant être pris en compte lors du choix des activités de TUC a trait à la présence de ressources suffisantes, notamment celle d’une expertise en TUC et celle d’une équipe de travail. 

Le climat de l’équipe

Le climat organisationnel joue un rôle clé dans l’analyse du contexte d’implantation. Cette analyse comprend, entre autres, l’ouverture au changement, la stabilité des équipes de travail, la présence d’autres projets qui demandent une grande mobilisation du personnel ainsi que le climat régnant au sein des équipes de travail. Un climat de travail positif où l’on retrouve peu de conflits, de même qu’une équipe de travail stable et ouverte à un changement de pratique s’avèrent être des conditions très favorables à l’implantation d’une activité de TUC. Au contraire, des préoccupations face au changement, la présence de projets concurrents ou concomitants, ou encore la présence d’un historique de crise ou de conflits de travail seront des freins importants lors de l’implantation des activités de TUC choisies.

En présence d’un climat d’équipe défavorable, il est suggéré d’attendre le moment opportun pour implanter les activités de TUC, quitte à retarder ou à annuler l’implantation. Pour faire l’analyse du contexte d’implantation, une simple visite du milieu ou de l’équipe de travail visé par le projet TUC peut être suffisante. Il suffit parfois de poser directement des questions au public cible ainsi qu’aux gestionnaires. Par exemple, on voudra savoir si des conflits persistent dans le milieu visé, si ce dernier fait face à des changements importants ou si on y est déjà en train d’assimiler une nouvelle connaissance. L’idée est donc d’aller s’enquérir auprès du milieu visé si le moment pour faire l’implantation du projet de TUC est bien choisi et si les connaissances à transférer pourront facilement s’intégrer aux pratiques en place.

Exemple d’une étude de cas - Ouverture au changement

« Il faut une organisation et des intervenants qui sont ouverts au changement, qui sont ouverts à essayer, à prendre des risques de changer les pratiques pour innover et essayer des nouvelles façons de faire. On est souvent pris dans nos pratiques habituelles et institutionnelles, et lorsque quelqu’un arrive avec des outils pertinents et reconnus, ceux-ci ne sont pas bien reçus puisque cela demande de changer les pratiques.»  

Exemple d’une étude de cas - La réalité du milieu d’implantation

« Je pense que ce qui a été long, d’après ce que j’ai compris de la situation, c’est le démarrage du projet. Je pense que l’établissement était favorable au projet puisqu’ils ont quand même payé mon salaire. Ils ont renouvelé mon travail, ce qui représente une volonté que ce soit développé et implanté. Après, il y a eu des changements au niveau de certains directeurs et l’implantation a été reportée à cause d’un truc de priorisation organisationnelle. L’équipe de travail recevait au même moment des formations sur plein d’autres affaires. Ça surchargeait vraiment tout le monde, donc l’implantation a été reportée au printemps.»

Le leadership

Outre les aspects liés au climat organisationnel, il s’avère également important d’évaluer les appuis et le soutien plus stratégique dont profitera le projet de TUC. Le projet de TUC est-il soutenu par les dirigeants de l’organisation et les gestionnaires? Croient-ils au bien-fondé du projet et à la pertinence des connaissances qui vont être transférées? Ce type d’appui facilite le TUC, car il vient légitimer le projet TUC. D’autre part, la présence d’un leadership et d’un solide soutien permettent de s’assurer que les connaissances à transférer sont réellement arrimées à la mission et aux valeurs de l’organisation. Ce soutien stratégique sera aussi utile pour obtenir les fonds et les ressources nécessaires pour la mise en œuvre du projet de TUC.

Les gestionnaires ont un rôle de soutien proximal envers le public cible participant aux activités de TUC. Par-delà la mobilisation de la haute direction envers le projet de TUC, celle des gestionnaires est également critique quant à l’atteinte des retombées attendues. Ainsi, les gestionnaires doivent à la fois être motivés par le processus d’implantation des activités de TUC choisies, mais également être en mesure de mobiliser leur équipe (le public cible). Il est donc important de bien cibler les gestionnaires qui seront en appui au public cible et de vérifier leur position par rapport au projet de TUC.

Exemple d’une étude de cas - Soutien de la haute direction

« C’est sûr que l’engagement de la direction est l’un des ingrédients nécessaires pour que l’implantation fonctionne. Nous, on a eu un engagement formel de la direction. C’est plus qu’un engagement. C’est un investissement formel. Le directeur me donne chaque année une grosse somme d’argent pour gérer ma business. Alors, il investit l’argent. Il y a vraiment un engagement. Tous les directeurs sont impliqués dans ça. Ça, c’est incontournable pour moi. »

Exemple d’une étude de cas - Gestionnaires en appui au public cible

« Comme éducatrice, ce que j’ai comme opportunités à ma portée, ce sont les conférences-midi, les formations, les séminaires, la rencontre de supervision mensuelle. Mais, il ne faut pas oublier que ce que l’on propose comme stratégie dépend du fait que mon chef veut ou non que j’y participe. Par exemple, c’est le chef de service qui décide si on peut y aller ou non à une conférence-midi. »

Les ressources à notre disposition

En lien avec l’analyse du contexte de travail, il est important de connaitre les ressources financières, matérielles et humaines auxquelles il sera possible d'avoir accès. D’une part, la capacité d’obtenir ces ressources, que ce soit par le biais de ressources internes à l’organisation ou d’une source de financement externe, détermine l’ampleur des activités de TUC mises en place. D’autre part, des ressources doivent aussi être prévues pour la phase de pérennisation – phase de suivi après l’implantation sans laquelle les activités de TUC risquent probablement de ne pas avoir les retombées escomptées. Ainsi, le choix d'une activité ou d’activités de TUC doit minimalement prendre en compte le budget alloué, les effectifs et le temps disponibles, le matériel nécessaire, ainsi que les ressources disponibles afin d’assurer la pérennisation.

De façon plus spécifique, il faut idéalement avoir accès à deux types de ressources afin de favoriser la réussite d’un projet de TUC : la présence d’une solide équipe de travail et d’un expert en TUC. D’abord, il est préférable d’être entouré d’une équipe de travail solide pour mener le projet de TUC à terme, et ce, surtout si un changement de pratique est visé. Impliquer une variété d’acteurs dans le projet amène de nombreux bénéfices : un meilleur soutien dans les différentes phases d’élaboration, d’implantation et d’évaluation du projet, un accès à de l’expertise supplémentaire, ou encore la présence d'agents multiplicateurs facilitant la mobilisation autour du projet.

À ce niveau, avoir accès à un expert en TUC pour travailler sur le projet peut s’avérer être un net avantage. Un expert en TUC est une personne-clé, engagée pour faciliter les différentes phases d’élaboration, d’implantation et d’évaluation du projet de TUC. Il peut ainsi jouer un rôle proactif non seulement pour mettre en relation les gens, mais également pour faciliter l’accès aux ressources et aux connaissances déjà présentes au sein de l'organisation. Ce type de soutien peut s’avérer fort utile si l’expertise en TUC au sein de l’organisation est faible, ou lorsqu’il s’agit d’un projet de grande envergure. 

Exemple d’une étude de cas - Pérennisation des activités

« L’importance du suivi, de donner un accompagnement une fois que l’on a rendu l’information disponible. On peut assister à une conférence-midi très intéressante, mais si on sent comme intervenants que l’on ne peut rien faire avec l’information qui nous est donnée parce qu’il n’y a aucun suivi, ça peut être frustrant. C’est clair que ça peut nous décourager de la pertinence d’assister aux activités de transfert des connaissances. »

Exemple d’une étude de cas - Équipe de travail et expert du TUC

« Moi, je vois deux choses qui ont joué pour la réussite du projet. La première chose est d’avoir une équipe, d’avoir des piliers qui sont des leaders positifs dans le milieu, qui sont des porte-paroles pour encourager les pairs à participer aux activités de transfert des connaissances. La deuxième chose c’est de trouver des champions à l’intérieur même de l’organisation qui vont être bons pour animer, pour faire comprendre l’importance du transfert des connaissances. Dans ce projet, il [le champion] joue le rôle de transfert des connaissances en alimentant les cadres en temps réel avec des connaissances scientifiques. Par exemple, dans une réunion de cadres, on s’est demandé si on faisait réellement de la consultation. Il [le champion] est allé trouver un document du ministère, appuyé sur des données de recherche, qui définit la consultation et les activités rattachées à la consultation. »

Pour nous citer: 

Chaire d'étude sur l'application des connaissances dans le domaine des jeunes et de familles en difficulté (2015). "Le contexte de travail". SACO - Stratégies de transfert et d'utilisation des connaissances. Montréal : Chaire CJM-IU-UQAM d’étude sur l’application des connaissances dans le domaine des jeunes et des familles en difficulté. En ligne : http://www.saco.uqam.ca/demarche/analyser/contexte-de-travail (consulté le xx/xx/xxxx).